
…Si vous nous piquez, ne saignons-nous pas ? Si vous nous chatouillez, ne rions-nous pas ? Si vous nous empoisonnez, ne mourons-nous pas ? Si vous nous faites tort, ne nous vengerons-nous pas ? Si nous vous ressemblons dans le reste, nous vous ressemblerons aussi en cela... »
William Shakespeare
Ainsi, c’est par un massacre que l’Etat d’Israël a choisi de clore l’année 2008. Toutes les télévisions du monde ont donné à voir ces effroyables images de policiers palestiniens de la bande de Gaza, agonisant dans d’effroyables souffrances après avoir été fauchés par les bombardements de l’armée israélienne. Deux cent cinquante morts pour la seule journée du 27 décembre. Des civils (les policiers ne sont pas des combattants) victimes d’un raid où il s’agissait de tuer massivement, afin de semer la terreur, d’effrayer.
Y a-t-il une différence avec les massacres qui ont récemment été perpétrés en Inde par des jeunes gens fanatisés, ou avec les attentats meurtriers qui se déroulent presque quotidiennement en Irak ? La qualification de « crime terroriste » serait-elle réservée aux groupes qui ne sont pas officiellement mandatés par des Etats ? Israël prétend agir ainsi pour sa sécurité, en réponse aux attaques dont son espace territorial fait régulièrement l’objet de la part de combattants palestiniens. Mais que produit un pareil massacre ? Davantage de haine. Encore plus de désir de détruire Israël. Une rage encore plus grande chez les jeunes Palestiniens qui ne peuvent nourrir aucun autre rêve que celui de se venger.
Israël vit dans l’illusion que c’est en terrorisant les populations des Etats voisins, qui lui sont globalement hostiles, qu’il garantira son avenir. Il croit dans la religion de la force. Mais plus l’Etat hébreu agit ainsi, plus il suscite des vocations de combattants, et particulièrement des vocations de kamikazes. Devant les images de civils palestiniens agonisant, ce sont tous les Arabes et les Musulmans du monde entier qui éprouvent des sentiments de colère et des envies de châtier Israël à son tour. Depuis 1948, année de sa création, l’Etat d’Israël est parvenu, de fait, à venir à bout de toutes les menaces qui ont pesé sur son existence.
Mais combien de temps cela peut-il encore durer ? Les trois cents millions d’humains qui entourent Israël sont des barils de colère. Trois cents millions d’êtres qui n’en peuvent plus de l’humiliation à travers le déni et le mépris que subissent leurs frères palestiniens. Selon Olivier Abel « Le fort devient toujours plus barbare avec le faible, il faut donc armer le faible d’un contre pouvoir. Pour que la barbarie s’arrête, il faudrait retrouver le sens « épique » : traiter l’ennemi avec équité, avec respect, avec admiration même, comme David épargnant Saül ».
Gaza, ce terrifiant ghetto où sont enfermés, emmurés, un million et demi d’hommes et de femmes qui s’efforcent de survivre dans une misère insoutenable et cette terrifiante pénurie d’eau potable. Comment imaginer que, dans pareille situation, plusieurs dizaines de milliers de jeunes ne sont pas prêts à combattre jusqu’à la mort ? Israël peut tuer deux cents d’entre eux chaque jour, il y en aura toujours autant, et plus encore, qui seront prêts à aller se faire exploser au coeur des quartiers juifs quand l’occasion s’en présentera. Folie d’Israël qui creuse lui-même sa tombe.
Folie d’Israël qui génère la violence dont il se protège. Folie d’Israël qui, à l’époque de la suprématie de l’OLP, a tout fait pour favoriser le développement d’un mouvement islamiste voulu comme concurrent, et qui aujourd’hui fait tout pour le diaboliser. Or quand Israël agit avec barbarie, Israël œuvre pour la gloire de ce Hamas. Dans toute la Palestine d’abord. Dans tout le monde arabo-musulman in fine.
"Un Zianide."
mercredi 7 janvier 2009 - par Fabienne Marti
« Aimer la vérité, sachez la dire avec courage » Voltaire.
En ce début d’année, aux funestes auspices, demain semble si difficile à entrevoir en terre de Palestine massacrée et sacrifiée sur l’autel d’un impérialisme aveugle mené de main de maître par un petit état démocratique, à l’ambition hégémonique, dont les coups d’éclat exterminateurs, savamment planifiés et mis en scène à quelques semaines d’échéances électorales, viennent cruellement nous rappeler que la haine implacable est l’hiver du cœur.
Loin de Gaza, l’empreinte que laisse la nouvelle fureur guerrière d’Israël à nos sombres pensées est d’une extrême profondeur et gravité. Nos voix révoltées semblent se perdre devant l’immensité de l’horreur et de l’injustice qui s’abat sur la population palestinienne, avec une précision d’orfèvre du conflit armé.
Mais les mots, tout dérisoire qu’ils puissent paraître face au sang versé, n’ont-ils pas été de tout temps de vrais actes de résistance, capables d’éveiller les consciences les plus engourdies et de déclencher de grands mouvements citoyens, et ne nous permettent-ils pas aujourd’hui de coucher modestement sur papier notre plus vive indignation, tout en clamant unis dans une même ferveur et détermination :
« Nous sommes tous Palestiniens ! »
Parce qu’aucun gouvernement ne parviendra jamais à bâillonner l’opinion publique, parce que nous devons refuser avec force qu’il y ait de plus nobles causes à défendre que d’autres, et pour certaines (Ingrid Betancourt) de plus médiatiquement « bankable », parce que nous devons accepter d’être proscrits par une partie de l’intelligentsia manipulatrice qui hurle avec les loups à l’antisémitisme, plus soucieuse de ses propres intérêts que mue par l’éthique et la probité, la Vérité doit devenir un phare dans cette tourmente infâme qui assiège, détruit et tue depuis des décennies en Palestine.
Israël a dressé en toute impunité l’échafaud, mais c’était sans compter la clameur emplie de colère qui gronde dans les rues de nos grandes métropoles françaises et européennes, scandant avec la rage du désespoir l’anathème populaire.
Devant la stratégie belliqueuse que déploie le gouvernement israélien jour après jour sous nos yeux impuissants, ne peut-on légitimement se livrer à une rapide introspection nationale ?
En effet, dans notre France de 2009 plurielle et métissée, qui entonne à l’unisson l’hymne de la diversité, proclamant avec une fierté non feinte reconnaître et aimer tous ses enfants, le silence assourdissant de nos élites, politique et intellectuelle, face au martyre du peuple palestinien est coupable de la plus lâche inconséquence, à défaut d’autre chose…
Notre « pays des Lumières », atone, se cherche désespérément ses grands penseurs qui firent son lustre d’antan…
Où sont les esprits libres, courageux et vertueux, ceux qui osent s’affranchir de toutes les tutelles du pouvoir, de l’argent et de la notoriété, pour s’aventurer sur la voie périlleuse, solitaire, mais ô combien salvatrice de la Lumière ?
Où sont les explorateurs de la Vérité, les pourfendeurs de la haine et de l’ignorance, les âmes intègres et dignes, qui gravent au fronton de « nos murs de la honte » les seuls mots susceptibles d’apaiser la souffrance : justice, raison, espoir, vertu, foi, fraternité ?
Esprits, penseurs, que ne cherchez-vous à dissiper les ombres funestes qui planent sur notre monde ténébreux, pris dans les rets d’un conflit aux intrications internationales, nous conduisant au bord de gouffres insondables, animés par une seule exigence : la Beauté de l’intelligence et du cœur, universelle et rédemptrice, seule à même de rassembler et d’éclairer notre avenir commun.
Face au ressentiment exacerbé qui monte, votre mutisme est fautif.
Face aux mains qui se tendent, votre inertie est blâmable.
Face aux cris de détresse qui retentissent, votre autisme est condamnable.
Devant cette consternante désaffection de ceux qui pensent, légifèrent, et relaient l’information, dont certains s’autoproclament experts de l’islam pour mieux le fustiger en place publique, au moment même où les méfaits d’un capitalisme outrancier nous plongent dans les affres d’une crise économique endémique, ajoutant à l’accablement du quotidien, c’est au plus profond de notre âme que nous trouverons les ressources inépuisables pour garder intacts l’Amour et l’Espoir.
« Aimer la vérité », c’est en percevoir toutes les données objectives.
« Savoir la dire avec courage », c’est admettre une fois pour toutes qu’on on ne réserve pas aux Palestiniens, et plus largement aux musulmans et à l’islam le même traitement qu’aux autres peuples ou religions.
La quête de la vérité est un réel sacerdoce, un engagement plein et entier, dont le prix à payer fait peu d’émules. Le temps des héros semble définitivement révolu…
Aussi est-ce au nom des valeurs universelles qui nous réunissent, à l’image des récentes manifestations qui ont mobilisé plusieurs milliers de concitoyens de toutes confessions, musulmans, juifs et catholiques sous les mêmes bannières, que nous devons opposer sans relâche à l’hydre hideux de la barbarie en Palestine notre volonté nationale de rassemblement pour faire résonner notre réprobation unanime et sans compromission.
Si nos regards en quête de justice, de respect et de fraternité contemplent dans le ciel constellé l’astre divin qui brille et fait renaître l’espoir, c’est pour mieux interpeller ceux qui ici-bas raisonnent, dissertent, débattent, font et défont l’opinion :
Sortez de votre torpeur, Esprits, Penseurs,
Partez à l’assaut de toutes les citadelles de nos préjugés,
Montez sur les tours, sentinelles de l’Intelligence, de l’Ethique et de la Vérité,
Combattez l’ignominie, et répandez l’idéal de Justice,
Levez-vous donc Esprits, Penseurs !
Il n’est que temps…
par Fabienne Marti
A mes parents
C’est en proie à un profond dilemme intérieur, symptomatique du climat délétère et hostile à l’islam qui assombrit malheureusement chaque jour notre ciel hexagonal, que je me présente à vous, dissimulée sous un pseudo, pour vous livrer ce témoignage empreint d’une vibrante émotion et de la plus grande sincérité.
Luttant contre des sentiments ambivalents qui me tiraillent sans répit, oscillant entre une culpabilité intransigeante et une sourde révolte, j’ai finalement choisi la prudence en masquant mon identité pour retracer le long cheminement qui m’a menée vers l’essentiel : ma conversion à l’islam.
Si bien des obstacles jalonnent encore ma route, si de cruelles questions existentielles me plongent parfois dans le désarroi, ma foi en Dieu est ce précieux flambeau qui illumine ma vie de sa vaste clarté et me fait percevoir un hymne d’amour dans tout ce qui m’entoure. L’existence terrestre, ma propre existence prennent alors tout leur sens.
Devant nos yeux, les ténèbres de l’ignorance banalisée et du racisme instrumentalisé nous conduisent inexorablement vers l’abîme. Il ne tient qu’à nous de montrer qu’en marchant vers Dieu nous bâtissons des ponts entre les hommes.
Pour comprendre mon parcours, il me faut évoquer en premier lieu l’Algérie. Cette terre ensoleillée aux couleurs azurées de la méditerranée, qui enfant me semblait si lointaine, a marqué de son empreinte indélébile toute mon histoire familiale.
Oran, Mostaganem, Arzew, Tlemcen, Saint-Leu, cinq noms de ville qui ont bercé la douce quiétude de ma petite enfance, et dont les paysages exotiques me faisaient rêver, m’imaginant là-bas, sous d’autres cieux, dans d’autres circonstances.
Cinq noms synonymes de souffrance quand, vers dix ans, j’ai lu la nostalgie inconsolable dans les yeux de mes très chers parents, et que j’ai ressenti au tréfonds de mon être l’intensité de leur douleur à l’idée de l’impossible retour.
Je suis fille et petite-fille de pieds-noirs, arrivés en 1830 et partis en 1963. Mon frère est né à Oran, j’ai vu le jour en France, et je nourris l’espoir de découvrir cette contrée qui m’est depuis si longtemps familière.
L’Algérie et son long cortège d’épreuves, de part et d’autre, des familles endeuillées, décimées, déracinées, des générations sacrifiées.
L’Algérie, c’est l’éveil de ma conscience politique, c’est le désir inassouvi de connaître la vérité, sans complaisance, de tirer des enseignements, de tisser des liens, riche des récits de mes parents qui regorgeaient de belles histoires d’amitié, de respect et de fraternité.
L’Algérie, c’est ma première rencontre avec l’islam, cette troisième religion du Livre, celle qui inconsciemment m’attirait, m’intriguant irrésistiblement parce qu’elle est la dernière révélation divine.
Elevée dans la plus pure tradition catholique, j’ai toujours cru en Dieu. La foi relève de l’indicible, et l’élévation spirituelle à laquelle j’aspirais était celle du cœur.
A l’adolescence, mon élan vers Dieu se traduisait par une profonde quête de sens, et une litanie de questions critiques dont j’abreuvais ma chère maman, au demeurant très pieuse, au sujet de notre religion.
Jusqu’au jour où j’ai dû me rendre à l’évidence : je croyais en Dieu, mais je rejetais le dogme catholique.
« Moi, je vais devant moi ; le poète en tout lieu
Se sent chez lui, sentant qu’il est partout chez Dieu »
C’est par ces vers que Victor Hugo a fait son entrée dans ma vie à l’âge de quatorze ans, provoquant en moi un choc et un émoi littéraires inégalés, qui depuis ne se sont jamais taris.
Cet immense poète romantique, ce dramaturge, ce romancier à la stature incomparable, cet artiste du verbe, virevoltant avec les mots, cet homme engagé a su toucher l’intériorité de mon âme. Son culte ineffable à Dieu, son amour absolu de la nature, de l’humanité, et de l’univers ont résonné en moi avec une rare intensité.
Je ne crains pas de dire que son œuvre magistrale, ses interrogations les plus intimes, sa proximité unique avec Dieu m’ont révélée à la foi, tout en développant progressivement mon intérêt pour l’islam.
Au panthéon de mes auteurs favoris, Hugo m’a accompagnée tout au long de ces dernières années, et lorsque j’ai appris qu’il s’était peut-être converti à l’islam, une certitude inébranlable m’a peu à peu envahie : je ne devais écouter que mon cœur, et faire abstraction des préjugés les plus funestes et destructeurs qui allaient bon train dans ma sphère socio-professionnelle.
« Et puis laisse ton cœur ouvert !
Le cœur, c’est la sainte fenêtre.
Le soleil de brume est couvert ;
Mais Dieu va rayonner peut-être ! »
Oui, laissons nos cœurs ouverts à l’autre, dans toute sa différence et son individualité.
La quintessence du message du Coran ne nous enjoint-elle pas à faire de nos différences une vraie richesse, à nous « entre-connaître » pour ne former qu’une seule et même communauté, celle de l’humanité.
Quelle ironie cinglante d’observer qu’à l’heure de la multiplicité des circuits de communication, entreprendre la simple démarche d’apprendre à connaître son prochain, de le respecter, d’échanger avec lui, constitue une véritable gageure pour nos sociétés occidentales !
J’ai franchi le pas de la conversion il y a un an de cela. Ce pacte scellé avec Dieu m’a procuré une source inestimable de plénitude, de sérénité et d’apaisement, comme une renaissance de l’âme.
En effet, après avoir été confrontée à la condamnation et l’ostracisme implacables d’un environnement relationnel médusé, aux yeux de qui j’incarnais l’exemple atypique à marginaliser d’urgence – la conversion à l’islam d’une femme occidentale, indépendante, autonome, cadre, sportive, passionnée par la culture, les voyages, bref une française de son temps - je m’engageais enfin spirituellement.
Après une longue phase de réflexion, de maturation, au cours de laquelle je me dois de le reconnaître « 2001 », le terrorisme et le poids du patriarcat ont été autant de facteurs de doutes et de questionnements, je choisissais enfin ma voie.
Si vous me croisiez aujourd’hui dans la rue, vous verriez qu’aucun « signe ostentatoire » ne me distingue, et que rien dans mon attitude n’indique de prime abord que je suis musulmane. Il faut dépasser le carcan réducteur des apparences pour discerner l’âme de croyante qui m’anime.
Certes, je le concède avec amertume, je me vois aujourd’hui contrainte de donner le change en permanence dans ma vie quotidienne et professionnelle, et de jouer à ce que je ne suis pas, à ce que je n’ai jamais vraiment été...
Face à ce que je qualifie d’inquisition inique et anachronique qui sévit de manière intolérable au « pays de Voltaire », permettez-moi de clamer non pas un « J’accuse ! », mais un humble « Je déplore ! » :
- Je déplore que notre classe politique, nos élites intellectuelles et les grands décideurs des médias français se rendent complices d’une stigmatisation orchestrée de l’islam et de ses fidèles, en conditionnant l’opinion à travers des représentations systématiquement négatives qui tronquent la réalité, abusent nos concitoyens, et au final déchaînent les passions.
- Je déplore que notre pays ne favorise pas l’émergence sur le devant de la scène d’une nouvelle génération de français musulmans, de toutes origines, susceptible d’apporter une réelle plus-value à notre société tant sur le plan intellectuel, politique, économique que scientifique, et pas uniquement sportif… (c’est une férue de sport qui parle…)
- Je déplore que l’on entretienne la peur pour mieux régner, que l’on caricature pour mieux humilier, que l’on exclut pour mieux affaiblir.
- Je déplore que les bienfaits de la loi sur la laïcité soient dévoyés pour être érigés en doctrine au détriment du spirituel, quel qu’il soit.
- Je déplore qu’en cette période de crise économique sans précédent, ceux qui nous gouvernent continuent de nous manipuler en surmédiatisant des « affaires » qui ne sont que des leurres.
- Je déplore enfin que l’essentiel soit perdu de vue : l’universalité de nos civilisations, de nos cultures, de nos religions, de nos langues, du sens même de notre existence.
Par-delà la brume épaisse du sectarisme et de l’islamophobie qui couvre, menaçante, notre horizon, je veux plus que jamais croire que le cœur de chaque homme, de chaque femme, peut à tout moment transpercer le rideau de l’indifférence, de l’ignorance et de la haine, pour rayonner.
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